Réforme Coderre: une lutte de pouvoir bureaucratique

Les coupures de 11% de la dotation budgétaire à l’arrondissement du Sud-Ouest prévue par la « Ville centrale » ne sont pas une réelle surprise excepté peut-être par son ampleur.

Ci-contre, le maire Benoit Dorais

Depuis les années du maire Tremblay, les tendances néo-libérales en matière d’économie occupent tout le terrain et les budgets aux arrondissements sont gelés sinon diminués.

C’est dans ce contexte que Denis Coderre et sa gang ont décidé d’aller plus loin pour « équilibrer » le budget municipal et « protéger » la structure administrative de la ville centre (la bureaucratie) avec en prime un peu de centralisation supplémentaire et au passage pourquoi ne pas s’attaquer à ses adversaires politiques dans les arrondissements.

La manœuvre Coderre est presque limpide. On étrangle financièrement les arrondissements (spécialement ceux de l’opposition politique), les services aux citoyens diminuent ou cafouillent et les citoyens-nes rouspètent, demandent que la Ville centrale s’en mêle et enlèvent des pouvoirs aux arrondissements. Stratégie désormais connue pour discréditer les adversaires. Une lutte de palais qui se passe au-dessus de la tête des citoyens-nes.

D’ailleurs, c’est ce qu’a compris le maire Ferrandez du Plateau Mont-Royal plus vite que les autres, lui qui a aussitôt parlé « de boycotter » certains projets de la ville centrale en guise de représailles si son arrondissement est pénalisé.

Le Maire du Sud-ouest et les 4 élu-e-s de Projet Montréal sont piégés

Quant aux élu-e-s du Sud-Ouest, ils ont décidé de faire appel à l’appui des résident-e-s pour demander ni plus ni moins que le retrait de la réforme Coderre. Mais même si l’objectif était atteint il nous ramènerait au statu quo inadmissible pour la majorité des ménages du Sud-Ouest. Pour l’instant, le maire Dorais, chef de Coalition Montréal, maintient sa stratégie, pour le moins douteuse à notre avis et jamais discuté par les citoyens-nes, qui met l’accent pour aller chercher des revenus autonomes à partir des permis de construction comme moyen de « contourner » le blocage de la ville centrale.

Les élu-e-s de Projet Montréal semblent d’accord. En effet, lors de la rencontre d’information du 10 septembre, le conseiller Craig Sauvé a soulevé comme principal argument contre la réforme Coderre que l’arrondissement allait perdre les revenus des permis de construction. Globalement les élu-e-s, graphique à l’appui, prétendent que le Sud-Ouest devrait recevoir plus de revenus de la ville centre puisque l’arrondissement contribue plus que les autres à l’augmentation des revenus de la ville. Cette position « très corporatiste » va nettement à l’encontre des idées de péréquation et d’équité entre les arrondissements, sur lesquelles devraient plutôt misés les élu-e-s.

Rappelons que cette stratégie des « revenus par les permis de construction » nous fait subir l’avalanche de condos qui ensevelit le Sud-Ouest depuis de nombreuses années. En l’absence d’une stratégie de lutte contre la pauvreté ces fonds sont peu utilisés pour l’acquisition de terrains et de bâtiments pour le logement social.

Résultats :
• le phénomène d’embourgeoisement frappe de plein fouet les ménages à faible et moyen revenus des quartiers comme Griffintown, Petite-Bourgogne, St-Henri et Pointe-Saint-Charles (évictions, harcèlement, hausses de loyers, reprises de possession. etc.)
• La population est en augmentation significative, les services diminuent et les taxes foncières et les loyers augmentent plus vite qu’ailleurs, résultat de la spéculation et de l’effervescence du marché.

Ainsi, coincé à l’os par la réforme Coderre l’arrondissement fait appel in extremis au « peuple du Sud-Ouest » pour faire pression sur l’Hôtel de Ville afin de bloquer la réforme. Mais pour la majorité « du peuple du Sud-Ouest » la situation est sans issue. Si la réforme passe, cela obligerait l’arrondissement à réduire de nouveau les services (Benoit Dorais avoue qu’il l’a déjà fait : « J’ai fait des coupes, parfois massives. Quand on est rendu à mettre à pied 16 personnes par année, ce sont des services qui ne se livrent pas » « Le Devoir, 29 août 2014 »). Si la réforme est bloquée, on revient au statu quo.

Les citoyennes et les citoyens piégés

Quel est donc l’intérêt pour les résident-e-s du Sud-Ouest de se « faire mobiliser » contre la réforme Coderre si c’est pour revenir au statu quo ? Choisir entre une vision néo-libérale dure ou une molle, c’est choisir entre la peste et le choléra.

D’autant plus que l’arrondissement a déjà en vue sa défaite face à la ville centrale. En effet, « une assemblée spéciale est convoquée le 7 octobre pour voter une résolution d’une augmentation de taxes supplémentaire pour 2015 ».

En l’absence d’une vraie stratégie de lutte politique contre la réforme Coderre qui pourrait profiter à la majorité des ménages du Sud-Ouest, les citoyens-nes du Sud-Ouest n’ont pas beaucoup d’intérêt à se mobiliser.

Nous suggérons aux élu-e-s d’employer la méthode Ferrandez en annonçant une série de représailles contre la ville centre, débattue en assemblée publique, plutôt que de nous inviter à voter une augmentation de taxes pour 2015.

2 commentaires

  1. Vanessa dit :

    Les arrondissements sont sous l’autorité de la commune? N’est-ce pas suicidaire d’étrangler ses composantes? Je pense que soit on libéralise totalement, c’est-à-dire que l’Etat n’intervient strictement pas dans l’économie, soit on est réellement interventionniste. Mais dans tous les cas, mettre en difficulté financière les arrondissements est la pire des décisions.

  2. Les citoyens doivent avoir plus de moyens à leurs dipositions, pour intérargir entre eux mais également avec les élus locaux.

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